Edito n°40 du 12 juin 2018
Publié le 12-06-2018
“Sur l’Arctique, il y a deux types de problème, l’imaginaire et le réel, et l’imaginaire est le plus réel!”
Wihjalmur Stefansson (1879-1962), ethnologue et explorateur arctique canadien
Avec cette citation, en exergue de son intervention à la tribune des premières « Perspectives stratégiques », l’ambassadeur et géographe Michel Foucher aura souligné l’importance de poser un regard lucide sur l’Arctique et sur les enjeux, voire les fantasmes que concentre cette région.
Ces premières « Perspectives stratégiques », co-organisées avec Diploweb.com, ont rassemblé plus de 150 participants le 30 mai dernier à l’Ecole militaire.
Elles visaient à répondre à la question : l’Arctique est-il –vraiment– stratégique ? Les trois intervenants qui se sont succédés, Thomas Merle, doctorant en géographie à l’université de Reims, Michel Foucher et Laurent Mayet, diplomate et adjoint de l’Ambassadeur pour les océans, auront plus particulièrement insisté sur les points qui suivent.
En dépit de la fonte accrue des glaces, les réalités physiques de l’Arctique (zone principalement maritime, grands froids, nuit polaire…) restent structurantes ; les intérêts manifestés pour cette région ne peuvent en faire abstraction. Il est par ailleurs essentiel que l’évolution de ces intérêts s’accompagne de celle des règles internationales qui les encadrent.
La Russie accentue ses prétentions régionales et s’est lancée depuis plusieurs années dans une véritable course au Pôle. L’Arctique ne constitue pas pour autant le cœur de ses intérêts stratégiques. Par ailleurs, si l’Arctique revêt une importance croissante pour la Norvège, si l’on peut plus globalement noter une tension vers une véritable logique régionale, cette partie du monde reste encore une périphérie.
Nous vous proposons de visionner la vidéo de synthèse de ces premières « Perspectives stratégiques » élaborée en partenariat avec Diploweb. Elle vous permettra de retrouver les points saillants des interventions et discours développés. La vidéo est disponible dans “La Bibliothèque” de Geostrategia et sur le site Youtube du CSFRS.
Nous vous proposons également cette semaine quatre articles pour nourrir votre réflexion stratégique : une pesée de l’impact de la variable identitaire diasporique sur le phénomène de radicalisation, une plongée au cœur des défis posés par la dialectique centre-périphérie en Chine, une analyse des positionnements géopolitiques au sein du « couple » franco-allemand, un réexamen du terrorisme vu de la rive sud de la Méditerranée.
Nous vous invitons enfin à découvrir dans « La Bibliothèque » de Geostrategia, le rapport final de l’étude POSEMAC soutenue par le CSFRS et menée par Mathieu Duchâtel et Alexandre Sheldon Duplaix, chercheurs à l’European Council on Foreign Relations (ECFR). L’étude décrypte la politique de sécurité maritime de la Chine à l’horizon 2025 et ses implications pour la France.
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L’article La question libérale en Russie est issu de la Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS). Régis Genté, journaliste indépendant, se penche sur le paradoxe clef que constitue cette question libérale et sur le dilemme qu’elle pose à la Russie. Un dilemme vieux de deux siècles : libéraliser l’économie pour la développer, avec le spectre d’une perte de contrôle de l’Etat sur les dynamiques politiques et économiques internes. L’article met en lumière la réalité et la portée d’un fonctionnement libéral russe parcellaire, et souligne une dichotomie entre secteurs non-stratégiques et secteurs considérés comme essentiels par le Kremlin, au risque que la Russie demeure une « puissance pauvre ».
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L’article Défis stratégiques dans les rapports centre/périphérie en Chine est issu de l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS). Emmanuel Lincot, sinologue, professeur à l’Institut Catholique de Paris, revisite la tension millénaire centre-périphérie qui structure la stratégie chinoise, à l’aune tant de l’accélération des échanges que des ambitions portées par Xi Jinping. Il nous propose donc une plongée au cœur de cette dialectique centre-périphérie en abordant tout à tour l’impact du projet OBOR (One Belt One Road), les tensions sino-indiennes, les défis en Asie centrale et les enjeux liés à la relation Chine-Russie.
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L’article Divergences géopolitiques entre la France et l’Allemagne est issu du cabinet de synthèse stratégique La Vigie. Pierre-Emmanuel Thomann, géopolitologue et président d’Eurocontinent, plate-forme de réflexion sur les enjeux géopolitiques européens et mondiaux, propose une analyse des positionnements géopolitiques au sein du « couple » franco-allemand. Pour l’auteur, les trajectoires sont largement divergentes et l’axe franco-allemand s’avère problématique aussi bien en interne que vis-à-vis des autres pays partenaires de l’Union européenne. Il envisage donc les prochains importants rendez-vous diplomatiques avec un scepticisme marqué.
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L’article Repenser le terrorisme : nouvelles menaces, nouvelles politiques est issu du CSFRS. Le colonel Mohsen Ben Aïssa est officier supérieur de la Garde nationale tunisienne, depuis peu retiré du service actif. Il nous propose un réexamen du terrorisme, au prisme de son parcours professionnel comme de ses travaux de recherche. S’appuyant sur une mise en perspective historique, l’auteur s’interroge sur les racines du phénomène et souligne notamment une difficulté et un risque : la définition du terrorisme et l’écueil à éviter de la confusion entre terrorisme et lutte légitime. Son approche de ces questions, vue de la rive sud de la Méditerranée, offre donc un point de vue singulier.
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Rendez-vous mardi 19 juin pour un prochain édito de votre Agora stratégique 2.0.
Auteur(s) : Olivier CARON, Directeur de publication Général Paul CESARI, Rédacteur en chef
Source(s) : CSFRS